Si les poissons ne dormaient pas, à quoi servirait le lit des rivières ? Egger Ph.

Nitrates et phosphates


Les nitrates

Les nitrates (NO3) constituent le produit final essentiel du cycle de l'azote mais, à la différence de l'ammoniaque et des nitrites, ils ne commencent vraiment à être toxiques qu'à des concentrations relativement élevées et sur un plus long terme.

Avec le temps, la concentration en nitrates a naturellement tendance à augmenter dans l'aquarium, graduellement, et, dans la plupart des bacs sans causer (à la différence des nitrites ou de l'ammoniaque) des symptômes biens nets ou spectaculaires.

Certaines espèces y sont plus sensibles que d'autres (par exemple les discus). Il est aussi bien connu que si l'on introduit de nouveaux poissons dans un aquarium établi dont la concentration de nitrates est importante, cela présente toujours un risque pour les nouveaux arrivants car, à la différence des anciens "locataires" du bac, ils n'ont pas eu le temps de s'habituer progressivement à ce taux de nitrates élevé.

Les indices possibles d'un taux de nitrates élevé, sans autres symptômes particuliers, sont une croissance médiocre de ces poissons, une plus ou moins grande léthargie, le développement de maladies et la mort successive de plusieurs poissons nouvellement arrivés (quelques semaines en général après leur introduction), des problèmes de l'équilibre chez les poissons rouges par exemple (troubles de la vessie natatoire) ... L'absence de symptômes bien spécifiques amène souvent l'aquariophile à sous-estimer ce problème.

Heureusement, quelques gestes simples permettent de limiter l'augmentation excessive des nitrates et d'éviter ces problèmes. On peut réduire leur concentration :

en plantant davantage dans la mesure où les plantes peuvent utiliser les nitrates comme nutriments (notez que les plantes flottantes sont particulièrement douées pour cette filtration parce qu'elles ne puisent aucun de leurs nutriments dans le sol);

par des changements d'eau partiels et réguliers, qui permettront de diluer les nitrates en renouvelant une partie de l'eau;

en nourrissant raisonnablement (trop nourrir ou surpeupler l'aquarium est également une cause indirecte de leur accumulation dans le bac : cela peut aussi encourager la multiplication indésirable d'une grande quantité d'algues);

en utilisant si nécessaire une résine anti-nitrates dans un des compartiments du filtre de l'aquarium.

Tester le taux de nitrates est facile grâce à des tests bon marché.


Un taux de 0-5 mg/litre est idéal bien-sûr mais, du fait de leur faible toxicité, un taux de 10 à 30 mg/l n'est pas pour autant dramatique en eau douce, sauf pour quelques espèces sensibles tels le discus. Le plus important est de ne pas les laisser s'accumuler lentement mais sûrement.



Un taux constamment supérieur à 50 mg/litre demandera en revanche - quelque soit l'espèce - de prendre des mesures appropriées (voir ci-dessus.) Si le taux de nitrates de l'eau de votre robinet est élevé et que vous avez des poissons délicats, il est alors possible d'employer de l'eau osmosée (qui doit être ensuite rechargée en minéraux avant d'être utilisable en aquariophilie.)



Un excès de nitrates est souvent le premier accusé lorsque survient une explosion d'algues dans l'aquarium : si leur importance ne doit pas être minimisée (y compris pour la santé des poissons sur le long terme), l'implication parallèle des phosphates ne doit pas être sous-estimée non plus. Un taux de phosphates constamment élevé (dont la toxicité pour les poissons n'a pas été clairement établie toutefois) peut constituer un formidable accélérateur dans le développement des algues, en particulier dans le cas de bacs peu plantés. Planter davantage est alors une mesure très efficace, à condition bien-sûr que les plantes jouissent par ailleurs de conditions favorables (taux de CO2 adapté, pas de carence en minéraux essentiels).

Le saviez-vous ?

Certains aquariophiles ajoutent régulièrement ... des nitrates et des phosphates dans leur aquarium très planté.

Cela semble très étrange de prime abord mais cette technique est en réalité basée sur une connaissance précise des besoins des plantes. Explication : les plantes aquatiques et semi-aquatiques répondent à un ratio dit de Redfield-Richards 1, qui établit que, dans des conditions optimales (éclairage, diffusion de CO2, températures, oligo éléments, etc) et dans un bac bien établi et très planté, le taux en nitrates qui permet un développement optimal des plantes sans favoriser les algues devrait représenter 10 à 15 fois le niveau des phosphates. Un déséquilibre s'installant à partir du moment où le taux des phosphates augmente et modifie ce rapport en leur faveur (encourage les algues). L'ajout de nitrates doit naturellement prendre en compte ceux qui sont rejetés quotidiennement dans le système du fait du cycle azoté et bien-sûr rester à un niveau suffisamment bas pour ne pas stresser les poissons. Le fabricant Kent Marine™ commercialise ainsi deux produits nommés Kent nitro+ et Kent phos+ répondant à ce besoin et donne des instructions très détaillées pour les novices ou les connaisseurs sur le dosage à envisager (après une phase d'essai et d'observation pour définir la dose précisément). Voir le lien en bas de page pour plus d'infos.

1 Ce concept est une extrapolation des recherches publiées en 1963 par Redfield, Ketchum et Richards et établissant l'adaptation interactive du plancton en milieu marin.


Les phosphates 

Les phosphates (PO4) : leur accumulation excessive devrait être évitée, même s'ils ne sont pas notoirement toxiques pour les poissons. Ce sont de formidables accélérateurs de la diffusion des algues (probablement davantage que les nitrates en fait). Toutefois, une faible quantité en eau douce n'est pas problématique, le phosphore faisant même partie du menu des plantes. Mais leur accumulation conduira presque inévitablement à une prolifération d'algues.

D'où viennent-ils ? D'abord peut-être de votre robinet ! De nombreuses compagnies des eaux l'emploient afin de réduire la corrosion des tuyaux.

Ensuite, ils sont libérés lors de la dégradation des déchets (exemple : nourriture non consommée) ou de plantes et d'animaux dans l'aquarium.

La qualité de la nourriture est elle aussi décisive : choisir des flocons de marque reconnue et contenant donc peu de phosphates est donc préférable.

Si vous observez une explosion d'algues, une des causes possibles est un taux de phosphates inhabituel : des tests sont disponibles en magasin, sous forme de kits ou bien électroniques (plus précis mais plus chers). Les phosphates se répartissant en plusieurs catégories, on ne les mesure pas tous mais les tests indiquent systématiquement le taux en phosphates non-organiques (les phosphates organiques étant prisonniers des cellules jusqu'à leur disparition, ils sont extrêmement difficiles à évaluer jusqu'à ce qu'ils soient libérés dans le système sous la première forme).

Comment éviter leur accumulation excessive ?

faire des changement d'eau réguliers;

planter ... et encore planter ! Les aquariums très plantés et raisonnablement peuplés souffrent très rarement d'une explosion d'algues et maintiennent un taux en phosphates relativement bas. En effet, les plantes, lorsqu'elles sont en bonne santé, sont capables d'utiliser et même de stocker (parfois au delà de leurs besoins véritables d'ailleurs) nitrates et phosphates. Les plantes flottantes absorbent ainsi une énorme quantité de phosphates, aussi il ne faut pas les négliger (en prenant garde toutefois à ce qu'elles ne bloquent pas la lumière, tout est une question d'équilibre);

siphonner les déchets accumulés dans le sol;

filtrer avec une résine anti phosphates;

nourrir raisonnablement avec des aliments pour poissons d'ornement de bonne qualité. Toujours décongeler préalablement et retirer l'eau des cubes de nourriture congelée avant de distribuer car ils contiennent souvent plein de phosphates.

avoir une population raisonnable de poissons limite la production de déchets : les aquariums surpeuplés ont toujours des taux de nitrates et de phosphates élevés.

utiliser de l'eau osmosée reminéralisée si l'eau du robinet est aussi en cause (certaines compagnies des eaux l'utilisent pour lutter contre la corrosion des tuyaux).

Les algues ne prolifèront dans un aquarium qu'en tirant partie de tous les nutriments non consommés par les plantes : des algues trop nombreuses sont donc l'indicateur d'un déséquilibre dans l'aquarium (trop de poissons, trop de nourriture, changements d'eau pas assez importants, aquarium insuffisamment planté ...) Il faut préciser toutefois qu'un aquarium établi depuis peu n'échappe qu'assez rarement à ce fléau : mais si le phénomène persiste au-delà des 6 premiers mois, il faudra définitivement s'interroger sur le problème.

L'aquariophile peste souvent contre les algues qui commencent à envahir le décor, tentent d'étouffer les plus belles plantes et salissent honteusement le verre de l'aquarium ... mais il ne faut pas oublier que sans les algues sur terre, la vie serait impossible. Avoir quelques algues dans son bac n'a rien d'anormal et de nombreux poissons en raffolent : mais seul le maintien d'un équilibre dans l'aquarium permettra d'en éviter la prolifération.


Egger Ph.